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Johann Michael HAYDN

(1737 - 1806)

Regina Cœli - MH 80

Ave Regina cælorum - MH 140

Christus factus est

Requiem en do - MH 155

 

Clémence TILQUIN, soprano

Valérie BONNARD, alto

Stephan VAN DYCK, ténor

Alejandro MEERAPFEL, basse

 

La Chapelle Vocale de Lausanne

Ensemble Vocal Heinrich Schütz - Annecy

Ensemble Baroque du Léman

Direction: Gonzalo MARTINEZ

 

Samedi 8 avril 2017 - Eglise de Mosinges - Cran Gevrier / Annecy - 20h00

Dimanche 9 avril 2017 - Temple de Lutry - 17h00

 

Concert retransmis en direct sur

 

 

Un joyau enfoui qui éclate au grand jour ! Qu'une telle musique soit tombée dans l’oubli paraît inconcevable. Solistes, chœur et orchestre sont là pour rendre un vibrant hommage à un compositeur presque totalement méconnu de nos jours, alors qu’il jouissait d’une renommée internationale de son vivant. Il est vrai que le pauvre était mal placé pour la gloire et la postérité entre son talentueux et prolixe frère Joseph Haydn et le grand Mozart. Ce fervent catholique écrivit pourtant près de 400 œuvres de musique sacrée : tout est à découvrir chez ce compositeur.

Une quinzaine de jours seulement a suffi à Michael Haydn pour composer ce Requiem d’une somptuosité et d’une profondeur particulières. Destiné à la cérémonie funèbre du prince-archevêque Siegmund von Schrattenbach - qui avait toujours été très respectueux de son maître de concert en tant qu’artiste - mort le 16 décembre 1771, le compositeur y met, en effet, le point final le 31 décembre.

Cependant, un élément biographique laisse à penser que Michael Haydn devait déjà être dans un état d'esprit particulièrement propice à l'écriture d'un Requiem au moment de la mort de l'archevêque: il venait en effet de perdre sa fille unique, à peine âgée d'un an, et il ne fait guère de doute que son Requiem peut donc se lire comme une mise en écho de deux deuils, l'un officiel et l'autre intime. Selon ses propres paroles, à partir de ce deuil, « une mélancolie commença à s’emparer de son comportement toujours paisible ». La référence, dès les premières mesures de l'œuvre, au Stabat mater de Giovanni Battista Pergolesi (1710-1736) qui connut une diffusion extraordinaire dans toute l'Europe du XVIIIe siècle, fut-elle perçue par les contemporains comme une expression canonique de l'affliction, un élément donc purement rhétorique, ou surent-ils y déceler l'aveu d'une souffrance personnelle ?

Le Requiem de Michael Haydn connut un grand succès et fut fréquemment exécuté de son vivant. C’était une sorte de référence à un point tel que Mozart, vingt ans plus tard, s’en inspirera à de nombreuses reprises pour son propre Requiem. On observe en effet dans les deux œuvres des ressemblances thématiques, rythmiques, structurelles. Ce Requiem possède toutes les qualités d’une grande œuvre avec sa solide architecture, ses contrastes harmoniques et dynamiques, sa prodigieuse inventivité mélodique, sa richesse dans le traitement vocal.

Le « Requiem aeternam » est construit sur une marche obsessionnelle aux cordes dans le grave. L’entrée du chœur en imitation est ponctuée par des syncopes de violons suivie des solistes dont le « Et lux perpetua » est semblable à celui de Mozart. C’est un magnifique travail de construction et de gradation dans l’intensité. Le « Kyrie » s’enchaîne et utilise une grande partie du matériau thématique déjà entendu.

La séquence qui suit, le fameux « Dies irae  », est un mouvement d’une grande originalité au traitement musical étonnant. Il n’est pas divisé en plusieurs parties comme chez Mozart. Haydn enchaîne les dix-neuf strophes d’un seul tenant, leur donnant à chacune une coloration différente. Habituellement, le « Dies irae » est le moment de frayeur avec ses visions d’enfer et son terrible Jugement que l’on trouve dans l’impressionnante séquence grégorienne ou dans des mises en musique ultérieures (Campra, Mozart, Verdi, Brahms, Britten). Là, il va se passer quelque chose d’autre. Scandé sur une énergique mesure à 3/4 donnant un fort balancement, le chœur fait son entrée en écriture verticale sur un thème sombre, puis, à chaque strophe, les voix solistes vont apparaître, seules ou s’unissant dans un chant parfois très lyrique entrecoupé par le chœur ou des fanfares de cuivres. Et plus la musique va avancer, plus l’effroi va s’estomper, l’œuvre gagner en sérénité et en luminosité pour se conclure sur un éclatant Do majeur. D’ailleurs, toutes les parties de ce Requiem se concluront en majeur. Comme un grand coup de soleil après l’obscurité.

Que de richesses recèle cette partition comme cet Offertoire émouvant et puissant où les solistes dialoguent avec le chœur, avec son « Quam olim Abrahae » dont la fugue pour le chœur annonce de très près celle du Requiem de Mozart, ce savant tissage des voix dans le Sanctus, ce Benedictus écrit dans un style si léger, et cet Agnus Dei solennel et plein d’espérance à sa subtile écriture orchestrale.

À la fois œuvre de circonstance et page d'une prégnante intimité, ce Requiem en ut mineur se révèle, au fil des écoutes, comme l’une des meilleures productions autrichiennes de ce type de la seconde moitié du XVIIIe siècle. Mêlant modernité d'écriture et références au riche passé de la musique sacrée salzbourgeoise, le Requiem en do mineur est un chef d’œuvre qui proclame le génie de Michael Haydn et lui garantit le droit de figurer parmi les plus grands musiciens de son époque.

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